La grande chartreuse : le massif de la Chartreuse, son histoire moderne (depuis bientôt un millénaire) est indissociable du Monastère de la Grande Chartreuse. Arrivé en 1084 accompagné de six compagnons, maître Bruno installe un ermitage dans un lieu reculé de chartreuse depuis connu sous le nom de désert de la Chartreuse. En ce lieu isolé et totalement inhabité, bordé au nord par le col de la Ruchère, et au sud par la vallée du Guiers mort, dominé de 1000 mètres par le Grand Som, ils installent leur maison, la première chartreuse, divisée en deux ensembles distants de près de quatre kilomètres: la maison basse ou Correrie abritait la communauté des frères et des ateliers ou dépendances quand la maison haute abritait le prieur et la communauté des pères.
Du premier monastère qui fut construit deux kilomètres plus haut que le monastère actuel, il ne reste rien, suite à l’événement qui eut lieu le 30 janvier 1132, 48 ans après l’arrivée de Bruno, sous le priorat de Guigues :
« En la vingt-troisième année du priorat de Guigues, une masse incroyable de neige, se précipitant des hauts sommets rocheux avec une soudaine impétuosité, emporta dans son effrayant tourbillon et ensevelit sous sa masse immense toutes les cellules des religieux sauf une, et avec elles six moines et un novice. »
L’emplacement de la maison haute est aujourd’hui marqué par deux chapelles construites à une centaine mètres de distance l’une de l’autre : en aval Notre Dame de Casalibus (littéralement « Notre-Dame des cabanes », par allusion aux petites maisons qui servaient de cellules aux moines), construite au XVème siècle, hors d’atteinte des avalanches et en amont la chapelle St-Bruno, perchée sur son rocher.
Les survivants de la catastrophe ne pouvaient songer à reconstruire au même endroit. Guigues, le prieur, choisit un nouvel emplacement deux kilomètres plus bas, mieux exposé et hors d’atteinte des avalanches.
Les travaux furent menés rapidement. On ne bâtit en pierre que l’église, aujourd’hui transformée et noyée au milieu de constructions plus récentes, et le Chapitre, qui possède maintenant encore intacte sa voûte du XIIe siècle. Une douzaine de cellules de bois furent construites, et l’église fut consacrée le 13 octobre 1133 par un ancien Chartreux, Hugues, deuxième du nom, successeur de saint Hugues sur le siège de Grenoble.
Le monastère de Guigues subsista un peu moins de deux siècles. Entre 1320 et 1676, le monastère subira huit incendies. Après l’incendie de 1676, Dom Innocent Le Masson reconstruisit le monastère selon un nouveau parti architectural, celui qu’on lui connaît. Les bâtiments sont classés monument historique depuis 1920.